En puisant dans le vocabulaire des danses folkloriques ukrainiennes, Olga Dukhovnaya opère clairement un acte de résistance à l’invasion et à la propagande russe. La longue période d’occupation soviétique ayant interdit toutes les cultures locales, elle choisit de poser la décomposition, le recyclage et l’invention comme ouverture à la création d’une version contemporaine de ces traditions et cultures populaires, particulières au-delà de leurs parentés slaves. Soit l’invention d’une danse palimpseste, d’une danse des possibles et des imprévisibles, dans un pays dominé et à la culture réprimée.
Initialement militaire et cosaque, extrêmement virtuose et précis, le hopak est lié aux arts martiaux et au sport de combat (mouvement de frapper, de balayer, de coup de pied). Un peu à la manière d’une battle, il était traditionnellement l’occasion d’un tour de force et d’une démonstration de qualités viriles. Par la grâce de ce travail chorégraphique, redécoupé, ralenti, modulé, combiné, vidé de sa charge symbolique guerrière, le geste gagne en épure formelle et en neutralité. Le duo de danseur semble agréger figures archaïques, éléments traditionnels, danse classique, break dance… Dans cette même stratégie formelle que Bela Bartok et son utilisation savante des folklores populaires et nationaux, Olga Dukhovnaya nous offre un pan résolument contemporain de l’histoire artistique ukrainienne.