Et si 27 ans était l’âge de déraison ? Celui où l’on finit par tout assumer jusqu’à la démesure. C’est ce que laisse entendre Loïc Nottet avec Addictocrate, son troisième album, au titre malicieux et un brin provocateur conçu aux côtés de Prinzly – beat-maker derrière certains des plus gros succès de Damso, Hamza et Disiz –, Mathieu Frings et Jules Fradet. Le chanteur s’est impliqué dans tous les aspects artistiques de son nouveau projet, de l’écriture aux chorégraphies en passant par l’esthétique. Passionné de mode, il a créé lui-même les tenues de scène XXL dans le cadre d’une collaboration avec l’atelier bruxellois Natan couture. Tenez-le-vous pour dit, le natif de Charleroi a décidé de pousser les curseurs au maximum après Selfocracy et Sillygomania pour s’assumer à fond dans ce disque entièrement écrit en français. Addictocrate, ce sont treize titres qui mélangent les genres et les époques pour faire se rencontrer arrangements de cordes classiques et sonorités urbaines. Une volonté de mêler toutes les influences qui ont construit Loïc, des plus anciennes aux plus modernes, pour offrir un album « au plus proche de lui-même ». Se dévoiler sans laisser la moindre zone d’ombre, voilà le programme, donc. Pouvait-on en attendre moins de la part d’un artiste [qui cherche à s’offrir et se dévoiler toujours plus à ses fans… Loïc explore son passé en commençant par l’enfance, période qui ne cesse de l’inspirer. « J’ai un peu grandi de mon côté, confesse-t-il. Je n’avais pas énormément de potes à l’école et comme je m’ennuyais, j’ai commencé à me raconter des histoires, à danser et chanter en cachette dans ma chambre. M’explorer était la seule activité que j’avais. » Avec Révérence, il adresse ses adieux à l’enfant en lui qui n’a jamais voulu devenir adulte. « Un titre qui illustre bien mon côté Peter Pan », sourit-il. L’auto-exploration se poursuit avec Danser, morceau pop qui fait office de premier single de l’album. « C’est au moment où j’ai commencé à danser que j’ai forgé mon caractère, reconnaît-il. J’avais neuf ans et je faisais du foot pour faire plaisir à mon père, mais j’assumais aussi complètement la danse qui n’était pas aussi mixte et cool qu’aujourd’hui à l’époque. Dans les vestiaires, l’atmosphère pouvait devenir un peu tendue. » Le regard des autres, Loïc a appris à l’affronter très tôt : passage obligé pour apprendre à s’aimer soi-même. Quant à l’amour romantique, il le prend à contrepied avec Je t’haine, une ballade piano voix où les masques tombent. Ne jouons-nous pas tous un rôle dans cette « société surfaite » ? L’expression vient de Loïc, qui envoie valser les bonnes manières dans Mélodrame et Trouble-Fête. On le sent libéré. Il l’affirme, cet album est comme une renaissance. Mais s’agit-il d’une célébration du nouveau Loïc ou d’une mise à mort de l’ancien ? Tendez bien l’oreille, un mot peut en cacher un autre. La plume du Belge s’est affûtée. Il a publié son premier roman en février, Les Aveuglés aux éditions Michel Lafon. Lui semble clairvoyant. Signe d’un artiste qui s’est enfin trouvé. Au fil des écoutes, l’évidence finit par frapper : il y a énormément de mesure et de sagesse dans tout l’excès d’Addictocrate.
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